« On n’est plus chez soi, murmurait-il. Je ne puis lever les yeux, maintenant, sans apercevoir cette soutane… Il est comme les corbeaux, ce gaillard-là ; il a un œil rond qui semble guetter et attendre quelque chose. Je ne me fie pas à ses grands airs de désintéressement. »
Le quatrième tome des Rougon-Macquart nous ramène en province dans la ville de Plassans. On y retrouve Marthe et François Mouret, couple consanguin qui vit paisiblement sa retraite dans une grande maison avec ses enfants Octave, Serge et Désirée. Mouret souhaite louer le deuxième étage à l’abbé Faujas et sa mère, même si sa famille est complètement athée.
D’apparence pauvre avec sa soutane élimée et un passé obscur, l’abbé Faujas, fraîchement débarqué de Besançon, cache bien son jeu. Petit à petit, il convertit les plus réticents et conquiert la ville de Plassans. Il va jusqu’à prendre la place de la famille Mouret au sein de sa propre maison. Et parvient à influencer femmes et de politiques grâce à l’instrumentalisation de Marthe et à se faire aimer de tous. Tous, sauf Mouret, dont il fait voler la famille en éclats.
Folie et religion
Ce roman est celui de l’ambition démesurée d’un curé sans scrupules, qui rappelle le personnage de Saccard dans La Curée. C’est aussi le roman de la folie et des dégénérescences, perçues dès le début par Marthe qui en éprouve une peur sourde. La peur de finir aux Tullettes comme sa grand-mère, ce que Zola nomme une « folie lucide ». Elle sombre effectivement dans la folie après être devenue dévote et entraîne son mari dans sa chute avant la catastrophe finale qui nous plonge dans un mauvais rêve.
J’ai été surprise par la naïveté de Marthe qui se laisse si facilement embobiner par l’abbé Faujas et sa famille, perçus comme des rats sans foi ni loi par le lecteur. Le voyeurisme y est toujours aussi présent et la manipulation religieuse vivement pointée du doigt dans ce tome où l’on retrouve d’ailleurs étrangement Félicité Rougon et Pierre Macquard, toujours aussi machiavéliques !