Alice est une femme de 48 ans, habitée par la solitude et qui ne s’est jamais sentie à sa place. Dans un salon de thé, elle rencontre un masseur japonais qui prend grand soin d’elle et lui permet littéralement de renaître. Elle décide alors de lui écrire une lettre intense pour lui exprimer sa gratitude et son amour.
« Je n’ai pas eu le temps de vous parler. Nous aurions peut-être gagné des jours de bonheur, ou alors j’aurais cessé de m’imaginer des choses qui ne sont pas. Je crois que je ne voulais pas savoir. J’ai toujours préféré le confort du fantasme aux risques de la vie. »
Cette lettre, incroyablement belle et sincère, fait ressurgir ses douleurs et ses secrets. Alice a connu une vie assez difficile avec l’impression d’avoir un corps qui ne lui appartenait pas. Fille d’un père analphabète, elle a été élevée dans l’idée qu’une femme se devait d’effectuer certaines tâches et dans la culture du silence. L’école et la littérature l’ont sauvée.
Sa lettre regorge de poésie, de douceur et de sensibilité. Elle fait aussi la part belle à la culture japonaise, une culture et une langue qu’Alice a souhaité découvrir pour se rapprocher de cet homme. Et qui m’a donné envie de découvrir davantage cette culture ambivalente et ses nombreuses subtilités, constituées d’un mélange d’archaïsme et d’ouverture d’esprit. J’y ai découvert le mot Ukiyo qui n’existe pas en français, et qui veut dire « profiter de l’instant, comme une bulle de joie. Il ordonne de savourer le moment, détaché de nos préoccupations à venir et du poids de notre passé. »
J’ai énormément apprécié ce livre pour toute cette beauté délicate, cette sincérité que l’on perçoit. La deuxième partie, bien que sombre, révèle les fragilités et souffrances de celle qui l’écrit. Elle pourrait en rebuter plus d’un et pourtant … Elle fait place à la lumière puisque le pouvoir libérateur de l’écriture aboutit ici à une résurrection. Un moment de lecture d’une grande intensité qui devrait être mis entre toutes les mains !
« Je vous écris toutes ces émotions, cette intimité. Ne suis-je pas ridicule ? Dois-je poster cette lettre ? Je ne sais si vous devez la lire mais je n’ai d’autre choix que de l’écrire. Sinon, je vais m’étouffer de tous ces mots retenus. »