Quelle magnifique épopée de 600 pages nous contant l’Italie du XXe siècle ! Mimo est confié par sa mère à l’âge de 12 ans à son oncle Alberto en apprentissage pour devenir sculpteur. Son talent, il ne le doit pas à cet oncle ivrogne et acariâtre mais à lui-même. Il rencontre Viola, la fille des Orsini, l’une des familles bourgeoises de Pietra d’Alba, petit village italien aux abords de Gênes. Ils se lient secrètement d’amitié car leur milieu social les en empêche. Elle lui confiera des livres pour qu’il se cultive et lui l’aidera à réaliser son rêve.
La petite taille de Mimo l’oblige à en faire toujours deux fois plus que les autres. Au fil des ans, il passe d’une existence de « bête » à celle d’un sculpteur renommé à force d’acharnement et grâce à l’influence de la famille Orsini. Celle-ci est grandement impliquée dans la vie religieuse et politique du pays que l’on voit se transformer au profit du fascisme.
Ce roman follement romanesque nous emporte à travers les années dans l’Histoire grâce à des personnages foisonnants. Mimo vit mille vies et parvient à trouver sa place dans ce monde qui le boudait depuis sa naissance. Il prend des décisions surprenantes et possède un fort caractère et des convictions implacables, tout comme Viola, elle aussi ambitieuse. J’ai trouvé la fin un peu en-deçà du reste du roman où fleurissent les rebondissements. Une chose est sûre : ce Goncourt 2023 constitue un dépaysement garanti entre Rome, Florence et le monde de l’art.
« Partir ne changera rien, la pire violence, c’est l’habitude. L’habitude qui fait qu’une fille comme moi, intelligente, car je pense l’être, ne peut pas disposer d’elle-même. À force de me l’entendre dire, j’ai cru qu’ils savaient quelque chose que j’ignorais, qu’ils avaient un secret. Le seul secret, c’est qu’ils ne savent rien. Voilà ce que mes frères, voilà ce que les Gambale et tous les autres, essaient de protéger. »