Nicolas Mathieu raconte l’évolution de cinq adolescents de 1992 à 1998, rythmée par le chômage et l’agonie du monde ouvrier dans l’Est de la France. Anthony, le cousin, Hacine, Steph et Clem, tous ne viennent pas du même milieu social et sont malheureusement vite rattrapés par leurs origines. Clairement, il y a d’un côté ceux qui s’en sortent parce que « bien nés » et de l’autre – la classe populaire, les cassos – ceux qui font face à une certaine « fatalité congénitale », qui se perpétue de génération en génération. L’auteur explique dans ses interviews que son objectif est de rendre la vérité tellement insupportable qu’on n’aurait pas d’autre choix que de la changer.
Comme dans Aux animaux la guerre où il dépeint de manière assez violente les Vosges comme un endroit totalement déprimant, son but n’est visiblement pas de ramener des touristes dans notre région. Il vise plutôt à pointer du doigt la mécanique de la reproduction sociale et scolaire parce qu’elle fait partie de la réalité et qu’on ne peut pas l’ignorer. Je reconnais qu’en évoquant les ZAC bétonnées, Heillange, les hauts fourneaux et la sidérurgie, la description d’une partie de notre région est somme toute réaliste, même si elle possède aussi de vrais atouts. Il fait de nombreux clins d’oeil aux années 90, dont la coupe du monde 98 qui évoque forcément des souvenirs pour beaucoup. Une analyse sociale implacable et une jeunesse désenchantée qui soulèvent la question suivante : est-on condamné à mener l’existence de nos parents ?