« La grande préoccupation de la société était de savoir à quels amusements elle allait tuer le temps. »
La curée, c’est littéralement la portion d’une bête tuée laissée aux chiens de chasse. Pour Zola, c’est Paris sous Napoléon III, alors que le baron Haussmann dessine des avenues flambant neuves qu’une multitude de spéculateurs s’arrache. C’est la ruée vers l’argent.
Ce deuxième tome des Rougon-Macquart renvoie à une société factice dans un Paris de la fête permanente qui mêle opulence, plaisirs, sexe et argent. Ici, toutes les régressions sont permises : le mensonge, l’adultère et même l’inceste.
Des personnages profondément viciés
On y retrouve Aristide Rougon, devenu Saccard, débarquant à Paris où il épouse Renée, à l’origine de sa nouvelle fortune. Il fait partie de ces spéculateurs véreux qui misent tout sur l’immobilier et adore le mensonge et les intrigues compliquées. Son fils Maxime devient très proche de sa belle-mère avec laquelle il s’amuse lors de leurs sorties au Bois de Boulogne des scandales des uns et des autres. Renée est perçue comme une femme très belle qui meurt d’ennui et a toujours besoin d’une extravagance plus haute et d’un besoin de tapage plus irrésistible. Ce qui devait finir par arriver arriva…
« L’éternel coup de vent qui entrait dans l’appartement de la rue de Rivoli et en faisait battre les portes, souffla plus fort, à mesure que Maxime grandit, que Saccard élargit le cercle de ses opérations, et que Renée mit plus de fièvre dans sa recherche d’une jouissance inconnue. Ces trois êtres finirent par y mener une existence étonnante de liberté et de folie. Ce fut le fruit mûr et prodigieux d’une époque. La rue montait dans l’appartement, avec son roulement de voitures, son coudoiement d’inconnus, sa licence de paroles ».
Il y a aussi Sidonie, la sœur de Saccard, décrite comme une entremetteuse et un homme d’affaires, avec un appétit de l’argent commun aux Rougon. Une belle brochette de personnages tous plus viciés les uns que les autres, qui aura valu à Zola des critiques pour ce côté so obscène. Il rétorque qu’il ne fait que mettre en lumière la vérité.
La lecture de la curée vous promet une histoire extravagante qui traduit la débâcle de toute une société, à grands renforts d’étoffes et de cancans mais aussi une part de tragédie.