toucher la terre ferme livre

Toucher la terre ferme, Julia Kerninon

« Toutes les mères étaient encore, quelque part dans le secret de leur tête, la personne qu’elles avaient été auparavant, parce qu’on ne change pas vraiment, au fond. On devient simplement plus intensément soi-même.» 

Julia Kerninon a toujours fui, pour se sentir libre, à l’instar de son héroïne Liv Maria. Elle avait l’habitude d’être souvent seule, de lire et d’écrire avec passion sans avoir de compte à rendre à personne. Alors le jour de son premier accouchement, sur le parking de la maternité, elle envisage de fuir à nouveau. Et y renonce pour retrouver son bébé qui a besoin d’elle.

Ce livre est autobiographique et raconte la personne qu’a été Julia Kerninon avant d’avoir des enfants ainsi que le bouleversement d’être mère. Cette personne qui a un passé existe finalement toujours au-delà du fait d’être mère car celui-ci est inscrit en elle. Il y a une véritable volonté de rappeler son histoire car elle est sans arrêt renvoyée à ses souvenirs. Elle clame aimer profondément ses enfants et aimer aussi ses souvenirs dans cette vie où tout était plus facile, plus léger avant eux. Il y a donc une réelle ambivalence entre sa joie d’être mère et le « regret » de sa vie passée, comme pour de nombreuses femmes. L’autrice explique qu’elle a besoin de rechercher cette ancienne version d’elle-même pour se retrouver pleinement. Une manière sans doute de rappeler que chacune forme un tout avec son passé qui nous appartient à jamais.

J’aime toujours beaucoup l’écriture de l’auteur que je trouve bouleversante. J’ai néanmoins été un peu déçue par le contenu de ce livre car j’imaginais qu’il parlerait davantage de maternité. Il en parle avec justesse. Toutefois, je reconnais qu’il s’agit principalement d’un récit personnel et authentique dans lequel on ne se retrouve pas forcément.

« Des années après, je continue de me demander pourquoi mon corps, qui ne m’avait toujours servi qu’à m’asseoir devant une table de travail ou à faire l’amour, s’est montré si capable une nuit de novembre et une nuit de mai. Quand un homme me confie qu’il a eu un enfant, lui aussi, je pense en silence. Mon ami, soyons sérieux. J’étais sur le proscenium, en habits de feu, et tu louais un fauteuil d’orchestre. Tu n’as pas la moindre idée. J’ai envie de lui parler du sang, de la peur réaliste de mourir, de la douleur hallucinante, osseuse, de la morsure des points qui cicatrisent, des seins meurtris, de la pression suffocante des montées de lait, de cette impression d’avoir été fendue en deux par une hache, écartelée en étoile, points cardinaux, rose des sables. »

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