Une suite captivante
15 ans après la mise en place de Gilead – et 35 après l’écriture de la Servante Ecarlate – Margaret Atwood raconte la suite de sa célèbre dystopie. Et quelle suite captivante, passionnante et inattendue ! Elle constitue une étude sociologique du monde créé par Atwood en réponse à ses fidèles lecteurs. Une étude à la loupe des rouages de ce système autrefois bien huilé sur le point de s’effondrer.
Les révélations ont lieu grâce au récit polyphonique de trois femmes. Issues de milieux différents, elles vont finir par se rencontrer.
Tante Lydia, fascinante à souhait
On retrouve tout d’abord la redoutable et fascinante Tante Lydia décrivant la décadence de Gilead. Bien que faisant partie des fondateurs du régime totalitaire, elle y a été forcée après une arrestation inhumaine alors qu’elle était juge. Cette information la rend subitement plus sympathique. L’ancienne juge réfléchit au système créé et aux problèmes qui perdurent dans ce pays. Certains comportements pernicieux et l’augmentation du taux d’émigration des Servantes traduisent une forte dégradation. Quant au cas de la disparition de « Baby Nicole », passée à la frontière par une Servante, il fascine toutes les âmes, quelle que soit leur origine.
D’autre part, le rôle des Tantes est finement décortiqué. Il s’agit d’une élite de femmes toute-puissantes chargées d’instaurer des lois à destination des femmes. Recrutement, formation, prêche, accessibilité aux connaissances et aux secrets les mieux gardés nous sont exposés. Ce personnage nous apostrophe régulièrement et nous interpelle en jouant un double jeu, à la fois brillant et pernicieux. Une grande remise en question la traverse et nous présente une femme d’une grande humanité.
Deux autres narratrices intéressantes et déterminées viennent compléter ce récit. Jade, une adolescente Canadienne entraînée pour infiltrer Gilead et Agnès, une jeune femme de bonne famille promise à un riche commandant. L’une ne connait ce monde qu’à travers les documentaires vus à la télé alors que l’autre a été forcée de grandir trop vite. Le mouvement clandestin Mayday est toujours efficace et les fanatiques plus que jamais présents.
Un éclairage indispensable
Le premier tome, centré sur la vie des Servantes, était d’un pessimisme exacerbé sur les dérives du totalitarisme. Je l’ai beaucoup apprécié pour son originalité et son côté visionnaire. Cependant, je trouve cette suite plus lumineuse, prédisant un avenir radieux et enthousiaste en dehors de ce système dégradant. Ce livre apporte à mon avis un éclairage indispensable à ce classique et constitue une réussite.
I’ve become swollen with power, true, but also nebulous with it—formless, shape-shifting. I am everywhere and nowhere: even in the minds of the Commanders I cast an unsettling shadow. How can I regain myself? How to shrink back to my normal size, the size of an ordinary woman?
Totalitarianisms may crumble from within, as they fail to keep the promises that brought them to power; or they may be attacked from without; or both. There are no sure-fire formulas, since very little in history is inevitable