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Revenir à Naples, Paco Ignacio Taibo II

Début 1900, Veracruz. Un groupe d’anarchistes napolitains souhaitant échapper à la prison embarque pour le Mexique en se faisant passer pour des paysans. Si au début, l’aventure s’avère idyllique, le groupe va vite déchanter. En effet, ils sont vu d’un mauvais œil par les Mexicains et leur gouvernement corrompu. Il faut dire aussi qu’ils vendent de la grappa illégalement et côtoient les indiens, au grand dam du gouverneur. On se demande d’ailleurs pourquoi au début du livre il Diavolo souhaite retourner à Naples à 93 ans. Mais aussi où sont passés ses compagnons de voyage. Ces deux récits nous sont contés en parallèle et entrecoupés des dialogues et ragots de deux femmes napolitaines peu loquaces étendant leur linge au balcon.

L’auteur nous offre beaucoup de scènes cocasses et des personnages charmants avides de tricheries. Le gros baron Cheli, le curé pas catholique, Diavolo qui fume et se meurt avec joie, la vieille Grimaldi, très perspicace … L’humour et la résignation se côtoient. On est bien vite embarqué dans ce roman très imagé (au sens propre comme au figuré) qui connaît aussi son lot de drames et de violences révolutionnaires. Un bon moment de lecture ponctué de dialogues drôles et de remarques pertinentes qui rendent le tout bien agréable !

« Le point positif, à Naples, c’est que personne ne me regarde avec compassion. Ici, chacun ses misères. Les Napolitains sont comme les Argentins : personne ne saurait être plus mal loti qu’eux. Ils croient, nous croyons, au destin, un destin écrit par le plus nul des romanciers ou un ennemi juré ; le pire est encore à venir, ça peut arriver, ça va arriver. Et pourtant, mes compatriotes sourient et éclatent de rire pour un rien, car ils croient aussi (peuple de tricheurs où je me sens profondément à l’aise) qu’il existe des trucs, des stratagèmes pour tromper le destin »

« En le racontant quelques heures plus tard, le dîner avait encore meilleur goût. Moi, gavé comme une oie, je me suis éloigné, avec des haut-le-cœur de plus en plus fréquents. Mais l’impitoyable Arpaia continuait à décrire, sous les regards avides du reste de la communauté, les mérous grillés aux piments de Jalapa et les beignets de banane, le porc qui trempait dans les haricots noirs, la soupe de crabe et les crevettes au lard. Et il répétait les recettes à la demande de l’auditoire, en rajoutant des couleurs et des parfums. Il a fallu que don Marco l’arrête avant que les autres sortent leurs couteaux et qu’il y ait des morts. La gourmandise est la pire des amies »

« Parce que j’ai beau être un gros salaud dégueulasse qui a volé l’argent de sa propre mère, abusé des aveugles et séduit de pauvres couturières, tout au fond de mon âme, j’ai le cœur d’un homme d’honneur, je suis comme les quatre mousquetaires à moi tout seul.  »

« Ce jour-là, j’ai su que Beatrice, de deux ans mon aînée, était la plus belle femme au monde, avec les grands sourires qu’elle adressait au orangers et au soleil de Veracruz, et ses cheveux attachés par un ruban rouge qui flottaient au vent. Et j’allais découvrir bientôt que vivre tout un mois en ne mangeant que des lapins et des oranges était tout aussi merveilleux »

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